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Actualités relatives à l’évaluation des incidences en région wallonne

Publié le : 05/06/2024 05 juin juin 06 2024

Ce 10 avril 2024, le parlement wallon a adopté un décret modifiant le livre Ier du Code de l’Environnement et le Code du Développement territorial[1]. Ce décret vise à transposer partiellement la Directive 2011/92/UE relative à l’évaluation des incidences de certains projets publics et privés sur l’environnement, telle que modifiée par la Directive 2014/52/UE[2].

Cette transposition partielle s’assimile en pratique à une mise en conformité de la législation wallonne avec la législation européenne. Il ressort en effet de l’exposé des motifs que son adoption fait suite à la réception par la Belgique, en ce compris la Région wallonne, d’une mise en demeure de la Commission européenne portant constat de la non-conformité de la transposition de certaines dispositions des directives précitées ainsi qu’à la réception d’un avis motivé par la Région wallonne portant sur la même infraction[3].

Outre cette mise en conformité, dont on soulignera l’impact sur la procédure de vérification préliminaire prévue par l’article D.65 du Code de l’Environnement (1), le législateur a également entendu profiter de l’adoption du décret pour améliorer la procédure de consultation transfrontière pour les projets ayant été identifiés comme susceptibles d’avoir une incidence notable pour l’environnement dans un contexte transfrontière (2) ainsi que pour amender la procédure de réunion d’information préalable du public (3).
 
  1. Mise en conformité de la procédure de vérification préliminaire

L’article D.65 du Code de l’Environnement encadre la procédure de vérification préliminaire que doit effectuer l’autorité compétente chargée d’apprécier le caractère complet ou recevable du dossier de demande et à l’issue de laquelle cette dernière doit déterminer si le projet doit ou non faire l’objet d’une étude d’incidence.
Dans sa mouture actuelle, cet article permet à l’autorité de prendre sa décision sur la nécessité d’imposer ou non une étude d’incidence dans un délai de 105 jours à dater du jour où elle a reçu le dossier de demande de permis[4].

Ce alors que l’article 4, § 6, de la Directive 2011/92/UE impose que cette décision intervienne dans un délai maximal de 90 jours[5].

L’article D.65, §3, du Code de l’Environnement est par conséquent modifié afin que ce délai maximum soit respecté[6].
 
  1. Amélioration de la procédure de consultation transfrontière

Découlant tant de la Directive 2011/92/UE[7] que de la Convention d’Espoo[8], le processus de consultation transfrontière vise à permettre aux régions, aux états et à leurs publics de participer au processus d’adoption d’un plan ou programme ou d’un projet dont la mise en œuvre sur le territoire d’une autre région ou état est susceptible d’avoir des incidences environnementales notables sur leur territoire.

Cette procédure de consultation transfrontière se conçoit comme une mesure devant permettre de prévenir, atténuer et surveiller tout impact préjudiciable important sur l’environnement dans un contexte transfrontière afin d’assurer un développement écologiquement rationnel et durable[9].

Cette procédure est actuellement organisée par les articles D.29-11 et R.41-9 du Code de l’Environnement.

Posant le constat de l’imprécision de l’article D.29-11, le législateur wallon a souhaité améliorer la procédure de consultation transfrontière. Pour ce faire, il a fait le choix d’abroger l’article D.29-11 au profit de l’insertion, dans la Partie III du Titre III du Code de l’Environnement, d’un chapitre IVbis entièrement dédié à la procédure de consultation transfrontière[10]. Ce nouveau chapitre est composé des articles D.29-24-1 à 8.

Cette réécriture de la procédure est appréciable et permettra une meilleure appréhension – notamment par le porteur du projet – de son organisation depuis la notification pour information du plan ou programme[11] ou du projet[12] jusqu’à la notification de la décision de l’autorité compétente sur le plan, le programme ou le projet soumis à permis[13].

À titre d’exemple, pour les projets, la procédure arrête désormais le délai précis dans lequel la notification pour information aux régions et états susceptibles d’être notablement affectés doit intervenir – 15 jours avant la date de la réunion d’information préalable[14] - et le délai précis dans lequel le dossier de demande de permis doit être transmis afin de permettre la participation effective du public et des états ou régions voisins – 30 jours avant le début de l’enquête publique[15].
Il est également désormais expressément prévu que la notification pour information adressée aux régions ou états susceptibles d’être notamment affectés doit mentionner que ces derniers sont invités à participer à la procédure de cadrage de l’étude d’incidences qui serait organisée à la demande du demandeur de permis par application de l’article D.69 du Code de l’Environnement[16].
 
  1. Amendement de la procédure de Réunion d’Information Préalable

La Réunion d’Information Préalable (RIP) est une procédure de consultation du public en amont du dépôt de sa demande de permis par un porteur de projet. Elle vise à permettre au demandeur de présenter son projet et au public de s’informer et d'émettre ses observations et suggestions concernant le projet.

Cette procédure est obligatoire pour les projets pour lesquels une étude d’incidence doit être réalisée.

L’article D.29-5 du Code de l’environnement, qui fixe les modalités de la RIP,  est amendé par le décret afin de permettre les évolutions suivantes visant à en renforcer l’effet utile :
  • permettre au demandeur de projet d’organiser plusieurs réunions d’information préalable identiques, qu’elles soient physiques ou virtuelles. Précisons que les travaux préparatoires soulignent que, dans le but de réduire la fracture numérique, le recours à la solution vidéo n’a pas, par principe, vocation à remplacer l’organisation d’une réunion physique[17];
  • permettre au demandeur de projet d’organiser la réunion dans une autre commune concernée que celle sur laquelle se trouve la plus grande superficie occupée par le projet, voire dans une commune limitrophe non concernée, dans le but de pouvoir accueillir un plus grand nombre de personnes sans que la salle de réception soit saturée;
  • permettre au demandeur de projet de filmer sur support vidéo la (les) réunion(s) d’information préalable à l’aide d’outils électroniques.
 
  1. Entrée en vigueur

L’article 23 du décret contient la disposition transitoire suivante :

« Les dispositions du présent décret ne s’appliquent pas aux procédures d’évaluation des incidences environnementales des projets pour lesquelles l’avis annonçant la réunion d’information préalable a fait l’objet d’une publication dans les médias avant la date d’entrée en vigueur du présent décret.
Les dispositions du présent décret ne s’appliquent pas aux procédures d’évaluation des incidences environnementales des plans et programmes pour lesquelles le Gouvernement, ou la personne qu’il délègue à cette fin, a soumis le projet de contenu du rapport sur les incidences environnementales ainsi que le projet de plan ou de programme pour avis au pôle « Environnement », aux communes concernées et aux personnes et instances qu’il juge nécessaire de consulter avant la date d’entrée en vigueur du présent décret. »

Le décret doit encore être publié au Moniteur belge.

 
 
[2] Cf. art. 1 du décret.
[3] Mise en demeure du 3 décembre 2020 (INFR : 2020/2344) et avis motivé du 1er juin 2023 ; Voir : Projet de décret modifiant le livre Ier du Code de l’Environnement et le Code du Développement territorial, Parl. w., exposé des motifs, 2023-2024, n°1643/1, p.4.
[4] L’exposé des motifs du décret résume très clairement la problématique : « Au sein du Livre Ier du Code de l’Environnement, l’article 4, paragraphe 6, de la directive a été transposé à l’article D65, §3. En vertu de cet article, lorsque l’autorité chargée d’apprécier le caractère complet et recevable de la demande a omis de prendre une décision sur la nécessité d’imposer ou non une étude d’incidences (« détermination »), cette autorité peut statuer sur la demande dans un délai plus long que 90 jours. En effet, l’autorité dispose d’un délai initial de 15 jours pour statuer sur le caractère complet et recevable de la demande, et sur la détermination, à partir du dépôt de la demande. Si l’autorité en question omet de se prononcer endéans le délai initial, étant donné que la procédure d’instruction n’est pas interrompue pour la cause, un nouveau délai d’une durée de 90 jours démarre au lendemain de l’expiration du délai initial, donnant un total de 105 jours. » ((Projet de décret modifiant le livre Ier du Code de l’Environnement et le Code du Développement territorial, Parl. w., exposé des motifs, 2023-2024, n°1643/1, p.15)
[5] L’article 4, § 6, de la directive 2011/92/UE telle que modifiée par la Directive 2014/52/UE dispose dans les termes suivants : « Les États membres veillent à ce que l'autorité compétente procède à sa détermination aussi rapidement que possible et dans un délai ne dépassant pas 90 jours à partir de la date à laquelle le maître d'ouvrage a présenté toutes les informations requises en vertu du paragraphe 4. Dans des cas exceptionnels, par exemple liés à la nature, à la complexité, à la localisation ou à la dimension du projet, l'autorité compétente peut prolonger ce délai pour procéder à sa détermination ; dans ce cas, l'autorité compétente informe par écrit le maître d'ouvrage des raisons justifiant la prolongation et de la date à laquelle elle prévoit de procéder à sa détermination ».
[6] Article 9, 3°, du Décret modifiant le livre Ier du Code de l’Environnement et le Code du Développement territorial.
[7] Article 7 de la Directive 2011/92/UE telle que modifiée par la Directive 2014/52/UE.
[8] Convention d’Espoo du 25 février 1991 sur l'évaluation de l'impact sur l'environnement dans un contexte transfrontière.
[9] Lire en ce sens les deuxième et quatrième paragraphes du préambule de la Convention d’Espoo.
[10] Article 6 du Décret modifiant le livre Ier du Code de l’Environnement et le Code du Développement territorial.
[11] Article D.29-24-2, §1.
[12] Article D.29-24-2, §2.
[13] Article D.29-24-6.
[14] Article D.29-24-2, §2, al. 1.
[15] Article D.29-24-4, §2, al. 2. Quant au délai de transmission des documents 30 jours avant l’enquête publique, les travaux préparatoires disposent dans les termes suivants : « La transmission de documents devra se faire au plus tard dans les 30 jours qui précèdent la date d’organisation de l’enquête publique en Région wallonne. Le recours à un délai est justifié dans la mesure où il est, en effet, important que l’Etat ou la Région voisin(e) dispose de suffisamment de temps que pour pouvoir organiser une procédure de consultation de son public ou, à tout le moins, informer son public qu’une telle procédure sera prochainement réalisée sur le territoire wallon. Le temps utile mis à l’organisation de cette information contribue à une participation efficace et sereine du public à la procédure de consultation. Il est précisé les informations devant être communiquées au stade de cette deuxième étape. Enfin, le paragraphe 3 précise que les modalités de remise d’avis des autorités transfrontières sont les mêmes que celles pour les autorités wallonnes » (Projet de décret modifiant le livre Ier du Code de l’Environnement et le Code du Développement territorial, Parl. w., exposé des motifs, 2023-2024, n°1643/1, p.83).
[16] L’article D.69, al.1, du Code de l’Environnement dispose dans les termes suivants : « L'autorité chargée d'apprécier le caractère complet ou recevable du dossier de demande remet si elle est sollicitée par le demandeur, un avis sur le champ d'application et le niveau de détail des informations devant figurer dans l'étude d'incidences, compte tenu des informations fournies par le demandeur, en particulier sur les caractéristiques spécifiques du projet, notamment la localisation et la capacité technique, et de son incidence probable sur l'environnement ».
[17] Projet de décret modifiant le livre Ier du Code de l’Environnement et le Code du Développement territorial, Parl. w., exposé des motifs, 2023-2024, n°1643/1, p.9.

Auteurs

Thomas Hazard
Avocat Associé
XIRIUS PUBLIC, Droit administratif, Droit constitutionnel, Droit de l'énergie, Droit de l'environnement et de l'urbanisme, Expropriations, Urbanisme et aménagement du territoire
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Dominique Vermer
Avocat Associé
XIRIUS PUBLIC, Droit administratif, Droit constitutionnel, Droit de l'énergie, Droit de l'environnement et de l'urbanisme, Expropriations, Urbanisme et aménagement du territoire
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